Chèr·e lecteurice,
Je me sens assez déconnectée du militantisme et de la politique ces jours-ci, et pas non plus assez connectée à l’esprit de Noël pour pouvoir vous offrir une lettre toute douce et chaleureuse. Les propos racistes et homophobes de Macron rapportées par Le Monde sont à vomir, son mépris face aux habitant·es de Mayotte l’est aussi, et je ne vous parle pas des délires de Trump. Bref, avant même de faire une overdose de roulés à la cannelle, on a la gerbe.
Pour alléger un peu tout ça, et commencer cette lettre avec des bonnes vibes, je vous invite à prendre le temps de célébrer les bonnes nouvelles de ces dernières semaines !
Sarkozy a un bracelet électronique (ne boudons pas notre plaisir), Paul Watson a été libéré, quatre mégabassines ont été reconnues illégales par la justice (dont celle de Sainte-Soline1) et la Norvège a annoncé qu’elle suspendait les contrats d’exploitation minière des fonds marins dans ses eaux arctiques en 2025 !
Ces trois dernières informations ne sont pas anodines parce qu’elles sont, entre autres, le résultat de longs mois de mobilisation citoyenne et associative. Elles prouvent une fois de plus que l’activisme marche : ça vaut la peine de se mobiliser pour freiner la destruction du monde !
Nous sommes le 22 décembre, je suis en Touraine, dans une maison de famille au fond des bois, devant un vieux poêle en fonte qui chauffe fort et sur lequel j’ai mis à mijoter du poulet à l’ivoirienne.
Je suis végétarienne depuis des années, mais c’est aujourd’hui l’anniversaire d’Hervé2, un des adolescents qu’on accueille avec Loue Solidaire (je vous en parlais dans ma lettre de novembre), et j’avais envie de lui faire plaisir. C’est sans doute un événement plein d’ambivalence pour lui. Il est content d’être fêté, mais c’est le signe que sa majorité se rapproche, alors que sa minorité n’a toujours pas été reconnue par l’État français. Cela fait plus d’un an qu’il est en France et il n’a toujours pas de perspectives d’avenir un peu solides. On n’a pas idée de la torture mentale que nos politiques migratoires font subir à ces enfants…
Enfin, pour l’heure, l’ambiance est à la fête : avant le repas d’anniversaire, Nino fend du bois avec Baptiste et Zéphyr le transporte dans la remorque de son tracteur en plastique, cet après-midi on ira voir un spectacle de Noël, on réfléchit aux menus du réveillon et on emballe les derniers cadeaux.
J’ai longtemps hésité sur le choix d’un sujet pour cette lettre. J’avais d’abord pensé à un sujet pas drôle du tout. J’ai un bon récit sur les violences obstétricales. Cela fait cinq ans tout pile que cette histoire a commencé et que j’ai reçu ce mois-ci le mail qui y met un point final, alors, je ne sais pas, il y avait dans cette concordance des dates une invitation à poser la dernière pierre de cette triste aventure.
Mais c’est Noël bientôt, mes enfants découpent des flocons en papier, vous êtes sans doute en train de faire des sablés ou de décorer un sapin, je ne voulais pas pourrir votre groove. Ça sera pour une prochaine fois.
J’ai esquissé d’autres débuts de lettre, sur d’autres sujets, mais finalement il faut que je me rende à l’évidence : la fin de l’année approche, il me reste peu de temps pour écrire, je suis dérangée toutes les deux minutes par un enfant surexcité par l’ambiance électrique de l’approche de Noël, donc il est plus sage de réduire mes ambitions. Cette lettre sera simple, et ça ira très bien comme ça.
De toute façon, qui regarde ses mails entre Noël et Nouvel An ?
Voici donc le programme de cette newsletter spéciale Noël :
Des idées de cadeaux de dernière minute (c’est demain !)
Un petit tour en cuisine
Quelques ressources pour survivre aux fêtes de famille
Idées de cadeaux
Noël c’est demain, et il vous manque encore un cadeau ? Pas de panique, voici deux idées pour des cadeaux de dernière minute.
Si vous avez le temps d’aller à la librairie (1): un bon bouquin
J’adore lire des romans, mais au quotidien je ne me l’autorise quasiment jamais. Je ne lis que des essais. Ou alors des romans très engagés, susceptibles de m’apprendre des trucs sur la politique, l’écologie ou autre sujet complètement sérieux et déprimant. Par exemple, la semaine dernière, à la bibli je me suis dit, allez, là j’ai envie d’un bon bouquin à lire sous la couette ! Tiens, ce roman sur une femme assassinée par des narcotrafiquants en Colombie, why not ? Comme prévu, c’était atroce, j’ai arrêté au bout de 10 pages.
Pareil pour les films ou les podcasts. Je ne choisis que des sujets comme l’exil, le féminisme, l’inceste, la politique, le capitalisme… Comme si je n’avais pas le droit de consacrer de l’espace mental à quelque chose qui ne soit pas “productif”, au sens où ça ne viendrait pas nourrir mon travail militant.
Mais là c’est les vacances, et je me suis fait un petit plaisir. On ne se refait pas, je n’ai pas choisi au hasard, j’ai pris un roman de Pauline Harmange (autrice de l’excellent Moi, les hommes, je les déteste) : Aux endroits brisés.
C’est un roman feel good, avec des sentiments, du drama, des personnages attachants, tous les ingrédients d’une belle histoire d’amour, mais avec le féminisme en plus. Un safe space du roman feel good, où on parle l’air de rien de sororité, de consentement, d’endométriose, de santé mentale et d’empouvoirement.
Un safe space du roman feel good, où on parle l’air de rien de sororité, de consentement, d’endométriose, de santé mentale et d’empouvoirement.
Je l’ai dévoré en deux jours, nichée devant la cheminée, hermétique à la vie familiale autour de moi, avec l’impression de me faire un délicieux cadeau à chaque page.
Alors je vous le recommande, pour vos amies féministes qui ont envie de légèreté, pour vos sœurs, vos mères et vos cousines, féministes ou pas-encore-féministes, et toustes vos copaines qui aiment les histoires d’amour.
Si vous avez le temps d’aller à la librairie (2): une bonne BD
Je viens de lire aussi La Distinction, j’ai bien ri et en même temps ça permet d’ouvrir plein de sujets passionnants sur ce qui nous définit, comment on se situe socialement etc. Idéal pour des discussions animées en famille !
S’il faut faire avec les moyens du bord : du réconfort en bocal
Un petit tour à la biocoop, 10 minutes en cuisine et hop, un joli cadeau maison !



Je parle bien sûr de l’indémodable kit SOS cookie ! Ma recette préférée est celle de Papilles et Pupilles.
Qu’est-ce qu’on mange ?
Ça, c’est le sujet numéro 1 de nos discussions depuis qu’on est arrivé·s dans la maison de famille. Qu’est-ce qu’on va manger le 24 ? et le 25 ? Et qui cuisine quoi ?
Noël sans sa dinde aux marron, sans foie gras et sans saumon ?
La moitié de la famille fait une syncope rien qu’à l’idée.
Quand on a grandi avec une alimentation carnée, réinventer des traditions culinaires végé pour les fêtes c’est un sacré défi. Noël sans sa dinde aux marron, sans foie gras et sans saumon ? La moitié de la famille fait une syncope rien qu’à l’idée. Et bien sûr, pas le droit à l’erreur : le moindre faux pas sera un prétexte à la horde des carnivores pour ne plus rien tester pendant longtemps. On me reproche encore le faux gras d’il y a deux ans, qui n’avait pas rencontré l’unanimité.
Alors, pour le foie gras, j’ai pas de solution, mais pour remplacer la dinde avec un plat principal gourmand et qui en met plein la vue, le Wellington fait bien l’affaire. Par exemple celui-ci ou celui-là (en version tressé, c’est le must).
Pour tout le reste du menu, mon endroit préféré pour piocher de l’inspiration, c’est le blog 100% végétal de Marie Laforêt. Une mine d’or, avec des recettes incroyables et des photos qui font rêver. Les roulés à la cannelle et les gaufres de pommes de terre font désormais partie de nos classiques !
Survivre aux fêtes de famille
Les grands débats
J’ai la chance d’avoir une famille et une belle-famille où il y a un relatif consensus sur les sujets sociaux et écologiques. Par exemple, hier j’ai trouvé ça dans la bibliothèque de la maison familiale. C’est rien, mais ça fait du bien.
Néanmoins le spectre est assez large : malgré une bonne équipe de wokistes, on rencontre encore quelques irréductibles macronistes (voire pire). Je ne suis pas une grande fan des débats enflammés avec un verre dans le nez. Ça me parait très vain. Les réunions familiales peuvent néanmoins avec certain·es interlocuteurices être de bons moments pour faire bouger les lignes, et pour ça il vaut mieux être équipés et savoir comment s’y prendre ! Petite astuce : commencer par écouter son interlocuteurice avec empathie, comprendre ses enjeux personnels avant d’entrer dans des débats de chiffres ou de concepts. Pour se préparer, il est encore temps d’écouter Le Guide de survie aux fêtes de famille du podcast Les Couilles sur la Table ou bien de jouer au Dîner écolo du siècle de Bon Pote.
S’échapper
Et si ça devient trop conflictuel ou trop pesant, le mieux est peut-être de s’échapper… Prenons soin de nous. Rien de mieux qu’un bon bol d’air froid pour échapper aux débats politique sans fin ou à la molle torpeur des vacances.
Un des trucs vraiment chouette dans le fait d’habiter à la campagne, c’est que je n’ai pas besoin d’aller ailleurs pour faire de superbes balades en pleine nature. Ces dernières semaines, certains matins tout était gelé, et c’était d’une beauté saisissante. Les toiles d’araignées se transforment en fines parures de cristal, les feuilles et les fleurs sont ourlées de givre, la brume flotte sur la forêt et tout scintille au moindre rayon de soleil. C’est un régal pour les yeux.









Là où je suis aujourd’hui, en Touraine, le soleil brille et l’air est froid. Quand j’aurai fini d’écrire, j’irai marcher un peu. Avec un peu de chance, je croiserai un sanglier !
Et joyeux Noël
L’année prochaine, je vous parlerai de lutte contre tous les systèmes de domination, de militantisme, de la co-autrice (tellement stylée) de ma bande dessinée, de violences gynécologiques et obstétricales, de violences sexuelles faites aux enfants, de comment j’articule mon militantisme/ma vie professionnelles/ma vie sociale et familiale et d’une expérience un peu folle dans laquelle j’embarque mes proches. Pour ne rien rater de tout ça, tu peux bien sûr t’abonner ici !
Je souhaite à chacun·e d’entre vous, quel que soit le rapport que vous entretenez avec cette période particulière, de passer une bonne fin d’année, autant que possible. Je vous envoie de la douceur.
Prenez soin de vous et de vos proches si vous en avez le courage/l’énergie/l’élan.
Joyeux Noël,
Louise
Comme la dernière fois, je vous mets un faux nom pour préserver son anonymat.